lundi, février 28, 2005

Bollywood

DE TOUT COEUR
Réalisé par Mani Ratnam
Scénario de Tigmanshu Dhulia, Mani Ratnam
Image : Santosh Sivan
Montage : Suresh Urs
Musique : A. R. Rahman
Production : Shekhar Kapur, Mani Ratnam, Ram Gopal Varma
(Inde, 1998, 151mn)
Avec : Shahrukh Khan (Armakanth Varma), Manisha Koirala (Meghna), Preity Zinta (Preeti Nair)

Quelque part en Inde, une gare, la nuit. Un journaliste croise une jeune femme enveloppée dans un grand châle... De l'amour au terrorisme, un film politique et poétique qui aborde un sujet sensible.
clip video sur le site de arte
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Un quai de gare glacial et désert, la nuit. Seul le hurlement du vent emplit l’espace. Jusqu’à l’arrivée d’Amarkant (Shahrukh Khan), qui s’évertue à entrer en contact avec la seule personne présente, une jeune femme farouchement silencieuse. C’est le début d’une quête qui va mener notre entreprenant journaliste au travers des méandres de l’amour...et du terrorisme.

Amarkant est journaliste pour All India Radio, il enquête auprès des peuples frontaliers du Nord de l’Inde pour savoir ce que l’indépendance de l’Inde leur a apporté, 50 ans après. Les réponses ne sont pas "politiquement correcte" -"La liberté ? nous n’avons pas de liberté"-, il veut aller plus loin, comprendre, allant jusqu’à rencontrer le chef d’un camps d’entraînement terroriste. Au cours de son périple, du Kashmir au Ladakh, il retrouve la belle inconnue, Meghna (Manisha Koirala). Ils sont amenés à faire la route ensemble, en compagnie d’errants (pèlerins ? réfugiés ?) dans des paysages de déserts escarpés grandioses et hostiles à la fois. Elle se dévoile peu, lui tombe amoureux de son mystère, insaisissable. Le prénom Meghna signifie nuage...Elle se détend peu à peu, semble prête à tomber elle aussi amoureuse, avant de disparaître.

De retour à Delhi, Amarkant reprend le cours de son existence, sa famille lui présente sa fiancée. Preity Zinta entre alors en scène avec son look occidental, son "hinglish", ses fossettes et sa façon très directe d’aborder la vie, le mariage arrangé, l’amour...Le mariage est décidé. Le jour des fiançailles, Meghna réapparaît. Et bientôt le mystère qui l’entoure se déchire et montre toute la souffrance d’un peuple, toute la violence engendrée par cette souffrance
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Dil Se est un film qui, comme Meghna, ne dévoile pas toutes ses qualités à la première vision. On est pris par un rythme rapide, par les aventures de ce journaliste au pays des mille et un cauchemars, par les scènes de guerre et de bagarre, par les impressions fortes laissées par ces peuples en plein désarroi, par ces paysages splendides, par cette diversité indienne qui va bien au-delà des clichés. Au-delà du choc de la première vision, il faut un peu de recul pour réaliser la subtilité de la construction du scénario, du climat créé qui laisse sourdre peu à peu la douleur, la distille pour mieux frapper, alternant avec des moments doux et drôles, nous laissant penser que la vie "normale", que l’amour peut reprendre ses droits.
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Il existe aussi dans Dil Se une véritable dimension poétique, délivrée par la musique d’A.R. Rahman, très présente, hypnotique, envoûtante, et les paroles de Gulzar (voir les traductions d’Angel). Les clips sont originaux, épurés, certains sont de véritables tableaux, tel Satrangi Re tourné au milieu des ruines dans un paysage désertique, comme un mirage en contrastes noir et blanc, eau et pierre, mi-lutte mi-danse, où chacun est prisonnier derrière le grillage de son rêve, pris au jeu de l’attraction - répulsion, dans une chorégraphie originale qui se termine par une étonnante pietà.
Chaiyya chaiyya, en début de film, propose également une chorégraphie inédite : sur le toit d’un train, les voyageurs entassés deviennent danseurs. Et tout laisse penser que le train roule vraiment dans les paysages escarpés traversés. Sans oublier Jiya Jale chanté par Lata Mangeshkar, filmé dans les Backwaters du Kerala, où Shahrukh Khan laisse entrevoir le futur Asoka....
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Shahrukh Khan est très juste, on a vraiment l’impression qu’il est journaliste lorsqu’il interviewe les gens ou qu’il anime son émission. On le voit passer de l’exubérance juvénile en début du film à la gravité d’une maturité qu’il n’a pas choisie quand il découvre peu à peu les réalités qui l’entourent. Son jeu traduit tout à fait les différents stades de l’amour évoqués par la littérature arabe et cités en début de film, l’attraction, la flamme, l’obsession, jusqu’à ne plus faire qu’un avec l’autre, dans la vie ou dans la mort...
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Manisha Koirala est exactement son rôle, son origine népalaise y contribue peut-être. Elle donne à Meghna beaucoup de sensibilité, dans les scènes graves comme dans celles où elle semble déposer son fardeau pour être un jeune femme comme les autres, drôle, souriante, fragile, rêveuse. Avant de revenir à la vie qui est la sienne, meurtrie et rebelle, résignée (ou presque) à ne plus pouvoir aimer. Preity Zinta apporte la détente dans un paysage plutôt dramatique, elle incarne parfaitement la vie gaie, simple, "politiquement correcte" qu’aurait pu choisir le journaliste.

Mani Ratnam, le réalisateur, montre une fois de plus sa maîtrise du rythme et des images fortes, sa spécificité aussi en créant un film qui tranche sur l’ambiance "rainbow world" de nombreux films hindis. Dil Se est une de ses plus belles réussites, qui nous touche... du fond du cœur.
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MESSAGE

*** Merci! Merci de m'avoir fait découvrir ce cinéma!

J'imaginais déjà la fin du monde dans un maëlstrom de violence et de
sang et je découvre à présent qu'il existe également un monde d'amour!
Comme cela m'enthousiasme! Depuis cette semaine, tout s'éclaire, les
éléments se meuvent d'eux-mêmes et me présentent enfin l'alternative que
je recherchais depuis mon enfance, un monde où l'on peut compter les uns
sur les autres, où la coopération efface la compétition, où la rivalité
disparaît et émerge une rationnalité réconciliée avec l'émotion. je la
soupçonnais et mes lectures pourtant me semblaient marginales. J'ai vu
ce soir à l'écran qu'il s'agit bien d'une tendance, irréversible, de
sensualité, de simplicité contre lesquelles aucune tyrannie ne peut
s'élever. L'ennemi requiert une opposition. Mais aucun élan d'amour ne
s'oppose à quoi que ce soit. La vie n'a d'ennemie que la mort et ceux
qui la déploient ne servent jamais que la tristesse. Hmm... Désolé de la
dérive, mais tout cet amour m'en inspire tellement plus...
HK

1 Comments:

Anonymous mimi34 ta cousine said...

magnifique philosophie a developper et surtout a transmetre

10:09 PM  

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